Dix ans après son premier album chez Blue Note et après deux LPs nu-soul/R&B unanimement salués par la critique, Robert Glasper revient à ses racines en proposant un disque sans Fender Rhodes, Pads electroniques ou le moindre saxophone harmonisé. 100% instrumental, Covered a été enregistré en live et en public aux studios Capitol de Los Angeles en décembre dernier. En compagnie de Vincente Archer à la basse et Damion Reid à la batterie, le duo présent sur ses deux premiers albums Blue Note, Robert Glasper livre 12 titres jazz sans pour autant perdre le côté R&B cultivé avec son Experiment. Des reprises de thèmes existants jalonnent cette heure d’écoute : les univers de Radiohead, John Legend, Kendrick Lamar, Bilal, Joni Mitchell ou encore Musiq Soulchild s’entrechoquent. On retrouve même un clin d’œil à Cindy Lauper (« Time after Time ») sur « In Case You Forgot ».
Sentiment partagé à l’écoute de Covered. Le talent et la virtuosité du pianiste -et du trio en général- est indéniable. On retrouve ici et là la touche Glasperisante sur ces reprises sélectionnées avec soin. Les habitués aux productions plus léchées en compagnie des meilleurs vocalistes de la scène soul américaine pourront se retrouver quelque peu désarmés face à un album instrumental à l’exécution irréprochable. On s’ennuie parfois face aux démonstrations techniques du patron actuel des touches noires et blanches. Avec un ou deux chanteurs (ou chanteuses), la copie aurait pu être bien meilleure d’un point de vue qualitatif.
Covered n’en reste pas moins très actuel : à l’image de Black Radio 2 et son « Jesus Children of America », Robert Glasper conclut son album avec deux titres engagés : Harry Belafonte raconte ainsi une journée dans la peau d’un citoyen noir aux Etats-Unis sur « Got Over », tandis que sur la reprise d’« I’m Dying of thirst », le classique de Kendrick, on assiste à un appel des minorités tuées par la police.
Jim Zelechowski
Robert Glasper Covered (Blue Note/Decca/Universal). Disponible en CD et version digitale.