Interview

Karriem Riggins « J’ai constamment faim de nouveaux sons »

Producteur pour Erykah Badu, Keziah Jones ou Common, mais aussi batteur de tournée chez Diana Krall, Karriem Riggins navigue entre hip hop et jazz.  Son premier long format en solo marie d’ailleurs habilement ces deux univers, en version instru only. Mais ce collègue de J Dilla et des Roots est aussi -forcément- un funkateer.

FunkU : Pour le fan de funk que vous êtes, les batteurs sont ils les héros de l’ombre du genre ?

Karriem Riggins : Carrément ! Particulièrement ceux dont les breaks ont été samplé, mais dont le nom n’est pas forcément cité: on parle d’un sample de James Brown par exemple. Pas de Clyde Stubblefield, ou Jabo Starks. Ce sont des noms que j’ai pour ma part découvert chez ma grand-mère : elle avait plein de 45-tours des JB’s. En plus de les écouter, je lisais aussi les notes au bas des pochettes… Un autre batteur funk joue un rôle très important pour moi : c’est Jerome « Bigfoot » Brailey, qui jouait avec la clique P-Funk. Un de mes groupes préférés, c’est justement Mutiny, qu’il avait monté après son passage chez Clinton. C’est un pote de Detroit qui me l’a fait connaître. Dwight Adams. C’est un gros fan de funk. Aujourd’hui, il joue de la trompette avec Stevie Wonder.

Ces artistes que vous citez, ce sont eux, justement, les artisans du fameux « one »…

Exactement. Le « one », c’est cette façon de marquer le premier temps. Le côté syncopé du rythme qui explose sur le 1 de 1,2,3,4 ! Ce qui était terrible avec P-Funk, c’est justement qu’il se décale sur le 3 ! (KR en fait la démonstration en fredonnant « Knee Deep »). C’est quelque chose qu’on entend aussi  parfaitement dans le hip-hop. Et plus particulièrement chez J Dilla : il y a une très grosse influence funk dans ses productions. C’est d’ailleurs à ça qu’on reconnaît aussi un bon producteur : quelqu’un qui écoute beaucoup, beaucoup de disques, mais qui sait isoler le bon élément.

Et vous, vous consommez toujours beaucoup de vinyle ?

Je suis toujours un collectionneur. Et un « digger ». En fait, j’ai constamment faim de nouveaux sons. En tous cas j’aime découvrir de « nouveaux anciens » trucs funk ! Régulièrement, je tombe sur un 45-tours d’un groupe qui m’était totalement inconnu…et qui me rend dingue ! J’ai un intérêt particulier pour les 45-tours, parce que la compression sur ces disques rend le son beaucoup plus chaud. Avec à l’arrivée, un feeling assez intemporel. Et puis…je suis forcément attentif au son de la batterie, c’est vrai !

La référence absolue en la matière ? Ce serait…

Pour moi, rien ne dépasse James Brown. La plupart de ses albums ont posé les bases du funk. Ce qui en fait aujourd’hui la grammaire. Après, je ne pourrai pas sortir un morceau plus qu’un autre dans toute sa discographie… Peut-être « Funky Drummer » ? On ne s’en lassera jamais de celui-là. « You can’t Beat that », vous avez raison !

 

Propos recueillis par Loïc Bussières.

Karriem Riggins Alone/Together (Stones Throw) www.karriemriggins.com/