Après Roy Ayers, c’est au tour de Marcos Valle de rejoindre la collection Jazz Is Dead initiée par les producteurs Adrian Younge et Ali Shaheed Muhammad (A Tribe Called Quest).
Véritable touche-à-tout de la musique brésilienne, affairé depuis cinq décennies à marier le patrimoine bossa nova et samba national au psychédélisme, au funk, à la soul ou à l’électro, selon les époques, le compositeur et chanteur Marcos Valle est de retour sur Jazz Is Dead. Aux côtés du duo maison Adrian Younge et Ali Shaheed Muhammad, Valle propose la quintessence de ce que cet outsider carioca sait faire : plonger l’héritage musical des pionniers brésiliens dans un bain de jouvence jamais hors-sol, préparé avec application par le brillant duo de producteur de Jazz Is Dead.
Le nom de Marcos Valle n’est pas inconnu à Los Angeles. Durant la deuxième moitié des années 60, Valle y a enregistré son album solo Samba ‘68 tout en étant membre à part entière d’un tout jeune groupe à l’existence éphémère aux côtés de Sergio Mendes, juste avant que ce dernier ne confirme son deal avec A&M Records pour l’éminent Brasil ‘66. Dix ans plus tard, Marcos Valle retourne aux États-Unis pour y séjourner six ans, principalement à Los Angeles donc. Là-bas, il se lie d’amitié avec de nombreux musiciens originaires de Chicago et développe une relation de travail profonde avec l’aventureux Leon Ware. Aussi étrange que cela puisse paraître, aucun enregistrement ne documente cette période de vie. Son travail aux côtés d’Ali Shaheed Muhammad (A Tribe Called Quest) et Adrian Younge, dévoilé le 21 août prochain par le label Jazz Is Dead, est ainsi la toute première musique qu’il enregistre aux Etats-Unis en 50 ans.
A l’instar de leur rencontre avec les musiciens brésiliens rassemblés pour une série de concerts à Los Angeles, sobrement nommée Jazz Està Morto, en juin 2019, Ali et Adrian rencontrent pour la première fois Joao Donato, Arthur Verocai et Marcos Valle, à Rio de Janeiro un peu plus tôt courant 2019. Un mois avant Jazz Està Morto et les sessions d’enregistrements de l’album qui suivront aux côtés de Valle, Ali et Adrian reçoivent de la musique du Brésilien : “Dès qu’on a reçu ses premières pistes, on s’est dit que Marcos était vraiment sérieux. Ça nous a totalement boosté. On lui avait envoyé quelques débuts d’idées et, en une poignée d’heures, il revient vers nous avec les voix déjà posées de manière impeccable, c’était vraiment magique”.
L’approche développée par Ali et Adrian est la même pour l’ensemble des sessions Jazz Is Dead : les deux producteurs se sont appliqués à creuser dans le back catalog de Marcos Valle afin d’y trouver une direction précise, de l’inspiration. Pourtant, contrairement à la plupart des artistes enregistrés pour Jazz Is Dead, Valle est toujours très actif en studio. Un album est sorti plus tôt cette année, Cinzento, mais celui pour Jazz Is Dead est différent des autres.
Si l’improvisation et la spontanéité sont des marqueurs forts du jazz de manière générale, l’album de Marcos Valle pour JID est sûrement l’un de ceux qui se rapprochent le plus de cette dynamique là. Marcos a réellement impressionné Ali par son professionnalisme et sa confiance en lui, dans ce nouvel environnement, avec un temps limité pour enregistrer les morceaux : “Marcos est tellement concentré, afin d’aboutir à l’enregistrement juste. Pour certains morceaux, il a littéralement écrit les paroles à la volée, avec ce qu’il se passait autour de lui en studio. C’est un musicien vraiment libre”.
La voix mélodieuse de Marcos Valle orne sept des huits morceaux de l’album, aux côtés de Patricia Alvi, sa femme, qui vient ajouter quelques textures de voix sur « Viajando Po Aí », une bossa nova luxuriante, aux allures de Stereolab en portugais. Loren Oden, du groupe The Midnight Hour, accompagne aussi Marcos pour un duo vocal très quiet storm sur « Gotta Love Again ». Sur « Não Saia da Praça », Valle développe une bossa nova plus anguleuse, qui sonne comme un morceau tiré d’un de ses chef-d’oeuvre du début des années 70, Garra. Les deux derniers morceaux font explicitement référence à la collaboration de Marcos avec un autre nom du roster Jazz Is Dead, le groupe Azymuth, via l’album Previsao do Tempo en 1973.
Le long de l’album, Marcos Valle s’illustre avec ce style de chant très mélodique et percussif (“wa-di-do-bem, ba di da we da bem”), une approche résolument brésilienne s’il en est. Marcos Valle et les sommités brésiliennes, rassemblées pour les sessions Jazz Is Dead dans leur ensemble, parviennent d’un disque à l’autre à créer chacun un sentiment très différent tout en utilisant la même palette musicale. “Il est intéressant de voir comment ces musiciens parviennent à utiliser à chaque fois les mêmes instruments, à écouter la même musique tout en obtenant cette saveur brésilienne différente que nous admirons tellement”, admet Adrian Younge. “Et entendre nos influences se mélanger aux leurs afin d’ouvrir la porte vers quelque chose de complètement nouveau, c’est un vrai rêve devenu réalité pour nous”.
Découvrez ci-dessous « Viajando Por Aí ». L’album Jazz Is Dead 003 sera disponible le 21 août.