
Dans les coulisses de “Sign of the Times Super Deluxe” avec l’archiviste Duane Tudahl
Archiviste du Prince Estate et auteur du livre Prince and the Purple Rain Era Studio Sessions: 1983 and 1984, Duane Tudahl a contribué à l’élaboration du coffret Sign of the Times Super Deluxe. Plongée au cœur du Vault en compagnie d’un fan passionné.
★★★★★★
Funk★U: Commençons par les trois disques de matériel inédit du coffret Sign of the Times Super Deluxe. De quelles sources audio êtes-vous partis pour faire votre sélection ?
Duane Tudahl : Avant tout, il faut savoir qu’il faut un an pour élaborer un coffret de ce genre. Il faut retrouver les images, faire toutes les recherches, dénicher les titres inédits, imaginer le packaging, penser au mastering, à la fabrication etc. Nous avons donc commencé par rechercher les mixes que Prince avait réalisé lui-même, quelque que soit le support. Dans tout ce que nous faisons, la source principale doit toujours être Prince. Par exemple, « Soul Psychedelicide » est un titre qu’il avait édité et mixé. Il avait produit cette version de 12 minutes à partir d’une répétition de The Revolution, à la veille du dernier concert américain de la tournée Parade au Madison Square Garden de New York, et ce titre était resté sur une étagère du Vault. Un autre exemple : nous savions que d’autres mixes de « Can I Play With U ? » circulaient dans le cercle des collectionneurs, mais, sauf erreur, nous avons choisi le dernier mix en date car c’est celui que Prince aurait sans doute sélectionné…
Plus généralement, nous avons cherché le moyen d’inclure dans ce coffret des choses que les fans les plus aguerris ne connaissaient pas. Par exemple, « Rebirth of the Flesh » contient une fin légèrement plus longue est des paroles que nous n’avions pas entendues dans les versions qui circulaient. C’est toujours intéressant de découvrir le premières intentions d’une chanson. Dans le livret du coffret, on découvre de nombreuses paroles manuscrites et on fait parfois d’étonnantes découvertes. Par exemple, « Starfish and Coffee » s’intitulait au départ « Starfish and Pee-pee » (« Etoile de mer et pipi », ndr) ! Susannah Melvoin a raconté cette histoire, mais sur le manuscrit des paroles que nous avons retrouvé, Prince avait barré “Pee-Pee” à l’encre rouge et réécrit “Starfish and Coffee” par-dessus. Prenez « Forever in My Life » : dans cette première version, on a l’impression d’entendre quelqu’un faire une déclaration à sa petite amie. On entend Prince presque sourire dans cette version, qui est très différente de celle qu’il produira un peu plus tard pour Sign of the Times. De la même manière, la version de « Crucial » présente dans ce coffret contient également les paroles originales de la chanson, qui ne sont pas celles de la version parue sur l’album Crystal Ball.
En tant que complétiste, j’ai envie d’entendre chaque note de musique enregistrée par Prince. Lorsqu’on trouve dans le Vault un titre qui diffère de ce qu’on connaissait déjà, c’est comme si on tombait sur une mine d’or. Quand on découvre quelque chose sur nouveau sur Prince, ce type d’informations procure un éclairage nouveau sur sa manière de travailler, et tout à coup, on a l’impression de se trouver seul dans le studio aux côtés du maestro, notamment lorsqu’il donne des instructions au groupe avant la prise de “Power Fantastic”, pour citer un exemple.
Dans cette sélection, on trouve des chansons inédites finalisées, mais aussi des titres joués live en studio et des répétitions en groupe, à l’image de « Soul Psychedelicide ». Pourquoi avoir opté pour ce mélange ?
Nous avons choisi cette option car l’album Sign of the Times est conçu de cette manière. On y trouve des titres plus anciens qu’il avait sélectionné dans le Vault, comme par exemple « I Could Never Take the Place of Your Man » qui remontait à 1979, ou encore « It’s Gonnna Be a Beautiful Night », qui est une improvisation live que Prince a choisi d’inclure dans l’album final. Il avait écrit la chanson dans l’après-midi, lors d’un soundcheck et il a décidé de la jouer sur scène le soir-même pour le public parisien. En rentrant à Minneapolis, il a ajouté quelques overdubs. C’est ce genre de progression, d’étapes successives avant d’arriver au résultat final, que nous avons voulu illustrer dans les choix de ce coffret, et cette variété des sources rend aussi l’écoute plus intéressante.
Avez-vous respecté une quelconque chronologie en élaborant ces trois disques d’inédits ?
Oui, car l’idée était de raconter une histoire, et lorsqu’on écoute ces titres inédits dans l’ordre de leur enregistrement, on découvre cette histoire. C’est une histoire assez complexe, mais ces chansons racontent la vie de Prince à ce moment précis. Elles soulignent également l’importance de l’influence de Susannah Melvoin dans l’écriture de Sign of the Times… Il est aussi intéressant de découvrir que certaines chansons peuvent en nourrir d’autres, à l’image de « It’s Be’s Like That Sometimes », qui contient des éléments de « The Ball », ou encore « The Cocoa Boys » qui fait référence à « It’s Gonna Be a Beautiful Night » et “Positivity” sur Lovesexy… En découvrant ces titres, j’ai parfois l’impression de reconstituer un puzzle géant et c’est une expérience très fun !
L’an dernier, Michael Howe nous expliquait que le le contenu de 1999 Deluxe proposait la quasi-totalité du matériel inédit enregistré par Prince au cours de cette période. Celle de Sign of the Times étant particulièrement riche, vous avez certainement dû faire des choix.
Absolument. Pour commencer, le coffret Sign of the Times Super Deluxe contient 8 CDs et un DVD, ou 13 vinyles et un DVD. Il coûte très cher, mais il fallait que son prix reste tout de même accessible et que son contenu soit exhaustif en même temps, même si en tant que fan, j’aurais adoré posséder un coffret de 20-CDs ! Ces rééditions sont comme un livre qui raconterait la carrière de Prince chapitre par chapitre. Sign of the Times n’est qu’un chapitre de cette histoire. Il y aura d’autres chapitres, et si une chanson manque à l’appel dans une réédition, il y a de fortes chances pour qu’elle apparaisse dans un volume suivant. Par exemple, nous avons choisi de ne pas inclure certaines chansons composées pour d’autres artistes et elle finiront peut-être dans un prochain volume de la série Originals, qui sait ? Il y a 47 titres inédits dans ce coffret, et j’ai lu il n’y a pas longtemps que ce coffret contenait plus de musique que Jimi Hendrix avait sorti de son vivant, où que Michael Jackson n’en avait publié au cours des années 1980 ! J’adorerais vous parler l’année prochaine d’un nouveau projet – voire de nouveaux projets -, et même de vous en parler chaque année pendant les vingt prochaines années. Bien entendu, je ne peux pas vous révéler le contenu du prochain projet, mais le Prince Estate est en train de travailler sur quelque chose d’inattendu, d’étonnant, de profond et de très complet. Prince a enregistré tellement de musique, et je pense qu’on parlera encore de ces rééditions pendant les vingt ou trente années à venir, voire plus.
Parlons des titres qui n’ont pas été sélectionnés pour ce coffret. Par exemple, avez-vous trouvé d’autres versions alternatives des titres de l’album Sign of the Times ?
Dans mon souvenir, nous avons trouvé des versions piano de certains titres, mais elles étaient incomplètes et la qualité sonore n’était pas aussi satisfaisante que nous le souhaitions, et il fallait avant tout choisir des versions satisfaisantes de chaque chanson. Un autre exemple : « Slow Love » date de 1984, mais la version qui figure sur Sign of the Times est la même, avec simplement l’ajout des cordes de Clare Fisher. Il faut bien comprendre que le Vault est énorme, et qu’on peut parfois tomber sur une chanson inédite sans titre ou une version alternative cachée à la fin d’une bande 24-pistes, mais nous n’avons pas trouvé de version antérieure de « Strange Relationship » par exemple. J’imagine que si nous la trouvons d’ici-là, elle figurera sur le coffret correspondant à la période en question. Et si nous l’avions trouvée, nous aurions eu quatre versions dans ce coffret : la démo originale, la version de Wendy & Lisa, celle de l’album et le mix de Shep Pettibone. Combien de fois peut-on entendre la même chanson dans un seul coffret ? Et quelle chanson aurions-nous dû retirer du tracklisting pour l’inclure ?
Pourquoi ne pas avoir choisi d’inclure des titres de cette période comme « Sexual Suicide », « Movie Star » ou « Last Heart » ? Ils sont déjà parus dans l’album Crystal Ball en 1998, mais ils auraient pu donner un panorama plus complet de cette période aux auditeurs.
Justement, nous ne les avons pas mis car ils étaient déjà sortis ! Il y a 47 inédits dans ce coffret, il n’y avait donc pas des place pour des titres déjà disponibles. En tant que fan, je préfère découvrir des chansons que je ne connais pas à la place d’autres déjà entendues dans d’autres albums.
Vous avez pourtant choisi d’inclure la version 45-tours de « Crystal Ball », alors que d’autres mixes de la version intégrale de près de dix minutes circulent depuis des années.
Nous aurions pu le faire, c’est vrai, mais Prince avait réalisé lui-même cet edit en vue de le publier en 45-tours. Un jour, Prince s’est rendu au studio en redemandant comment il pourrait compresser ce titre épique sur un single. C’était sa décision pour que le morceau puisse passer en radio. C’est un peu comme si Freddie Mercury avait choisi de couper les 2/3 de « Bohemian Rhapsody »…
Au rayon des fantasmes, Prince a évoqué lors d’une de ses dernières interviews une version de 17 minutes de « Adore ». L’avez-vous trouvée dans le Vault ?
J’en ai entendu parler, mais nous ne l’avons pas trouvée. Nous sommes toujours à la recherche de certains Graal, des titres, des jams, des répétitions ou des concerts précis. Je pense à la version originale de « Wally », entre autres (voir également notre entretien avec Susan Rogers, ndr.). La reprise de « Bad » de Michael Jackson est également sur notre liste, même si elle n’aurait pas pu figurer dans ce coffret car l’album Bad est sorti après Sign of the Times. J’adorerais l’entendre. Si quelqu’un l’a, qu’il contacte l’Estate (rires) !
En plus de ces trois disques inédits, l’édition Super Deluxe de Sign of the Times contient l’enregistrement live du concert d’Utrecht, le 20 juin 1987. Pourquoi avoir choisi ce show ?
Nous l’avons choisi car il s’agit d’un enregistrement soundboard qui ne circulait pas chez les fans, et aussi parce que nous avons souhaité nous écarter le plus possible du contenu du film officiel Sign of the Times. C’est aussi un enregistrement brut, qui retranscrit fidèlement ce qui se passait sur scène ce soir-là. Il y a quelques erreurs, mais il n’y a aucun overdub et on ressent particulièrement l’énergie et la puissance de cette performance, que je trouve excellente, et le groupe était vraiment tight.
Enfin, ce coffret propose le DVD inédit du concert du 31 décembre 1987 à Paisley Park, avec une apparition de Miles Davis.
Ce concert circulait chez les collectionneurs, mais de manière incomplète dans une copie vidéo dégradée et en mono. Personne n’avait vu les 45 premières minutes de ce show. Nous sommes retournés vers les masters d’origine et nous avons découvert les rushes de toutes les caméras, avec des plans de Prince et des angles qui ne figuraient pas dans le montage qui circulait. J’ai été réalisateur, producteur et monteur d’émissions TV pendant 30 ans, et mon travail sur ce DVD a consisté à proposer la meilleure version possible de ce concert à partir des sources originales et en stéréo. Ce concert est aussi très intéressant d’un point de vue historique : il documente la toute dernière performance de la tournée Sign of the Times, des mois après les derniers shows de la tournée, tout en anticipant la tournée Lovesexy, dont il venait de commencer l’enregistrement. C’est un point de transition fascinant qui établit un pont entre son point de vue sur Sign of the Times et Lovesexy, qui commence à germer.
Depuis trois ans, nous finissons nos entretiens avec les archivistes du Prince Estate avec cette même question : l’inventaire du Vault est-il terminé ?
Non, car nous parlons d’une carrière de 40 ans ! Prince pouvait enregistrer deux ou trois chansons par jour et il a donné des centaines de concerts, enregistré des vidéos et tourné plusieurs films au cours de sa vie. Il répétait également chaque jour pendant des heures et des heures, il a enregistré des albums qui ne sont jamais sortis, et a travaillé sur un grand nombre de chansons dont nous ignorons encore l’existence. L’exploration du Vault est un travail de titan et il faudra des années pour l’achever et essayer de tout comprendre. Prince a également bâti ce Vault pendant 40 ans, imaginez le temps qu’il faudra pour arriver au bout de cette histoire… Mais ceci fait également partie du bonheur, du plaisir et de la joie d’être un fan de Prince. Bob Dylan, les Beatles, les Monkees, les Beach Boys et Jimi Hendrix continuent de publier du matériel inédit. Hendrix est mort il y a 50 ans, et nous pouvons facilement imaginer que nous allons découvrir des titres inédits de Prince pendant les longues années à venir. Nos enfants, et même nos petits-enfants, entendront ces titres car Prince le mérite. Son héritage doit se prolonger aussi longtemps que possible, et notre mission consiste aussi à bâtir un pont vers les futures générations de fans de Prince. Prince était le meilleur. Personne n’a fait ce qu’il a fait, et plus personne ne le fera.
Une dernière question. Quand allez-vous signer un autre livre sur les séances d’enregistrement de Prince ?
Hier, j’ai rendu la première version du manuscrit de mon deuxième livre sur les séances studio de Prince et il devrait normalement sortir en mai 2021. Il couvre les années 1985 et 86, qui correspondent à la période allant de Parade à Sign of the Times. Si vous avez aimé le premier livre, vous allez aussi aimer celui-là car il contient des interviews avec 20 nouveaux intervenants qui étaient présents dans le studio avec lui. J’ai passé beaucoup de temps avec Wendy et Lisa, Susannah Melvoin, Susan Rogers et d’autres associés qui ne s’expriment que très rarement en public. Ce volume contient beaucoup plus d’informations, de dates et de détails. Il fera probablement plus de 500 pages, et c’est fou de se dire que ces 500 pages ne racontent que deux ans de la vie de Prince, mais c’est le témoignage de son ardeur au travail. De plus, de nombreux titres mentionnés dans ce livre sont désormais disponibles grâce à la sortie du coffret Sign O’ The Times Super Deluxe, et les lecteurs pourront ainsi les écouter en lisant le livre.
Propos recueillis par Christophe Geudin
Prince Sign of the Times Super Deluxe (Warner Records). Sortie le 25 septembre en éditions Super Deluxe (8CD+DVD / 13LP+DVD), Deluxe (3CD / 4LP 180-grammes) album remasterisé (2CD / 2LP 180-grammes couleur pêche) et versions digitales.

“Sign of the Times” par l’ingénieure du son Susan Rogers
Témoin privilégiée des enregistrements mythiques de Prince, l’ingénieure du son Susan Rogers a participé à l’élaboration de Sign of the Times. Pour Funk★U, elle se replonge dans le souvenir de l’élaboration d’un double chef-d’œuvre.
★★★★★★★
Funk★U : En réécoutant Sign of the Times, on se rend compte que l’album est extrêmement dépouillé, avec très peu d’orchestrations.
Susan Rogers : Sign of the Times était une période de transition pour Prince, qui était alors entre The Revolution et le groupe de Sheila E. Il n’était pas non plus en tournée à ce moment-là, et durant la période où nous avons travaillé ensemble, c’est le seul moment où il ne travaillait pas sur un film, ni sur la préparation d’une nouvelle tournée. Il avait donc beaucoup de temps pour enregistrer, et durant cette période de transition entre The Revolution et Sheila E., il devait enregistrer un album qui pourrait convenir à un nouveau type de groupe. Dans The Revolution, il y avait Wendy et Lisa, qui avaient suivi une formation classique et jazz, et qui avaient apporté un grand sens de l’harmonie dans sa musique. Le groupe de Sheila E. venait d’Oakland, dans la baie de San Francisco, et ils étaient nettement plus portés sur le funk. Durant l’enregistrement de Sign of the Times, Prince était conscient du type de chansons qui seraient le plus adaptées au style de Sheila E. et sur lesquelles elle pourrait l’accompagner, contrairement à celles qui convenaient mieux au style de The Revolution. Par conséquents, il enregistrait de nombreux titres funky et souvent minimalistes, à l’image de ceux qui allaient figurer dans The Black Album, mais en même temps, il enregistrait des chansons qui étaient purement du Prince, comme ” Sign of the Times “, la chanson-titre de l’album, ou encore ” Forever in My Life ” ou ” Hot Thing “, tous ces titres qu’il enregistrait seul dans son home-studio. Il avait également écrit de nombreux titres de Purple Rain de cette manière…
De plus, la construction de Paisley Park n’était pas encore terminée à ce moment précis, mais nous avions le meilleur home-studio possible depuis 1986. Il n’était pas très grand, il se trouvait dans sa maison, mais c’était presque un studio professionnel. Nous avions plus de matériel, et plus de temps pour travailler ses morceaux. Il était aussi extrêmement prolifique durant cette période, il écrivait tous les jours.
L’album est très dépouillé, mais le travail sur les voix est exceptionnel.
Oui, tout à fait. Prenez une chanson comme ” It ” et mettez-vous à sa place et imaginez-vous face du micro lors de sa prise vocale… Il avait toujours eu cette capacité, mais si on réécoute ses premiers albums, on se rend compte qu’il était encore en train de développer son falsetto. Il avait déjà cette tessiture, mais pas encore cette puissance, qui est venue au bout de quelques années d’expérience et de tournées. Pour ” If I Was Your Girlfriend “, il faisait ce que faisaient de nombreux producteurs à l’époque de l’enregistrement analogique en utilisant la technique de vari-speed. Il pouvait ralentir ou accélérer la vitesse de la bande pour changer le timbre de sa voix. Il avait découvert cette technique avant que je vienne travailler avec lui, en 1983. Il avait déjà utilisé ce procédé avec sa guitare sur ” Erotic City “, et nous nous en sommes aussi servis pour des parties de basse, ce qui marchait très bien, et sur la piste de batterie de ” U Got the Look “, qui était un titre très lent dans sa version originale. Il n’était pas satisfait de cette version, nous avons donc accéléré la bande et c’est la piste de batterie qu’on entend dans l’album. C’est pour cette raison que cette partie de batterie est très agressive et brillante.
Sign of the Times comprend aussi quelques-uns des plus grands titres soul de Prince, à l’image d’” Adore “…
Prince adorait les harmonies gospel et Il en parlait beaucoup en studio. Il aimait beaucoup les accords de 7ème et de 9ème. Il connaissait ses harmonies soul et R&B par cœur, et on l’entend très bien dans l’album Piano and a Microphone 1983. A travers ses doigts, on comprend qu’il connaît le jazz, le blues, mais aussi qu’il revient toujours à la pop, car Prince était un musicien pop qui possédait un bagage largement supérieur. Au moment de l’enregistrement de Sign of the Times, il écoutait beaucoup Hounds of Love de Kate Bush. Il aimait beaucoup True Blue de Madonna car Bernie Worrell jouait des claviers dessus. Pour son anniversaire, je lui avais offert une large sélection d’albums de Ray Charles car j’avais remarqué qu’il n’y faisait pas beaucoup référence.

Susan Rogers
Sign of the Times est aussi réputé pour ses incidents techniques lors de l’enregistrement.
Prince ne se souciait pas tellement de la perfection sonique. Notre rival, c’était Michael Jackson. Il était en Californie et il travaillait avec les meilleurs musiciens de séances de Los Angeles, il avait le meilleur ingénieur du son, Bruce Swedien, le meilleur producteur, Quincy Jones et le meilleur studio à Westlake Audio. Les albums de Prince étaient enregistrés dans le home-studio de sa propre maison et c’est la seule personne qui était à ses côtés, c’était moi. Prince ne s’intéressait pas beaucoup à la haute-fidélité, et il aimait ce côté cru, rough, à l’inverse des productions plus lisses de ses concurrents.
Dans le monde de Prince, un ingénieur du son devait travailler aussi vite que possible, rien ne comptait plus pour lui. Du coup, vous n’aviez pas vraiment le temps de vous lancer dans des expériences, il fallait préparer tous les réglages pour qu’il n’ait plus qu’à saisir ses instruments pour enregistrer sa chanson. Quand quelque chose ne fonctionnait pas, ce qui se passait souvent avec le matériel électronique, il était tellement obsédé par l’idée de continuer à créer qu’on ne pouvait pas l’arrêter. Il était vraiment contrarié à chaque fois qu’on interrompait son processus créatif. Il valait donc mieux lâcher prise et continuer en s’adaptant. C’est ce qui s’est passé sur ” The Ballad of Dorothy Parker ” par exemple : nous avions une nouvelle console, mais certains éléments de cette console n’étaient pas encore branchés, ce qui avait donné un aspect étouffé au son de la chanson. Mais Prince a aimé cet aspect, et nous n’avons pas retouché au titre. Dans ” Forever in My Life “, les chœurs ont été décalés involontairement lors du mixage, mais une fois encore, Prince a décidé de les conserver tels quels. Dans ” If I Was Your Girlfriend “, une piste de voix est légèrement saturée, et je grince des dents chaque fois que je la réécoute (rires). Je n’aime pas non plus le son de batterie de ” U Got the Look “, mais j’ai dû vivre avec.
Que pensez-vous de la nouvelle version remasterisée de l’album ?
Je n’ai pas réécouté l’ensemble de l’album, et je vais vous dire pourquoi : ces interviews me ramènent plus de trente ans en arrière et je dois me souvenir de la personne que j’étais à l’époque pour pouvoir m’exprimer sur cette période. C’est très difficile. J’entrais dans la trentaine, et je suis dans la soixantaine aujourd’hui. J’étais une débutante, et je suis maintenant une experte, j’enseigne à l’université et j’ai un doctorat. C’est très dur de réécouter tous ces titres aujourd’hui car ça m’éloigne beaucoup de qui je suis aujourd’hui… Dans les années 1980, on masterisait les albums pour le vinyle et il fallait contrôler les fréquences basses avec beaucoup de soin, car on risquait de faire sauter le diamant lorsqu’il passait sur le sillon. Bien sûr, il fallait faire aussi attention aux fréquences aigües et ce n’est plus le cas pour le streaming, où les aigus peuvent être plus aigus et les graves plus graves. De plus, je fais partie d’une génération qui a toujours été habituée au son du vinyle, et certains pourront se plaindre de déceler des différences entre ce nouveau mix et le mix d’origine. Mais se plaignent-ils car l’album ne sonne plus pareil, ou bien tout simplement car ils n’aiment pas le son. Chaque auditeur est différent, et chacun se fera sa propre opinion.
Vous souvenez-vous du cheminement des divers projets d’albums (The Dream Factory, Crystal Ball, Camille…) qui ont abouti à la création de Sign of the Times ?
Il faudrait être dans la tête de Prince pour pouvoir en parler. La plupart des artistes partent en tournée, puis rentrent chez eux pour écrire leur prochain album. Ils s’enferment pour écrire de nouvelles chansons, font appel à des musiciens pour faire des démos, puis à un producteur pour enregistrer l’album en studio. Ensuite, ils répètent les nouveaux titres avec un groupe puis repartent en tournée et ainsi de suite… Prince enregistrait tout le temps car il écrivait en permanence, ce qui signifiait que les projets d’albums pouvaient facilement se construire, ou bien s’écrouler très rapidement. Entre le départ de The Revolution et l’arrivée du groupe de Sheila E., son son avait évolué. Nous avions démarré The Dream Factory lorsque The Revolution était encore présent à ses côtés. Nous avions enregistré et mixé une série de titres, puis établi une séquence en vue d’un album. Prince aimait réécouter l’ensemble avant de prendre une décision. The Dream Factory était terminé, mais Il était clair que The Revolution n’allait pas durer, ce qui a précipité la fin de ce projet. Crystal Ball est arrivé ensuite, et Susannah Melvoin était une grande inspiration pour cet album. Après la séparation de The Revolution, Susannah était déchirée entre l’envie de retourner vivre à Los Angeles pour rejoindre sa sœur jumelle Wendy, ou rester à Minneapolis avec Prince. C’est ce qui a inspiré des chansons comme ” Big Tall Wall “, ” Crystal Ball “, ” Crucial “, ” Train ” ou encore ” Witness 4 the Prosecution “, autant de chansons décrivant les tensions dans leur relation. L’album Crystal Ball a finalement été refusé par Warner Brothers, qui ne voulait pas sortir de triple-album, puis Susannah est partie. Au final, ce départ a défini les chansons qui allaient terminer sur Sign of the Times.
Certains de vos titres préférés de Prince figurent dans les 3CDs de cette réédition Super Deluxe.
Absolument ! J’adore ” Witness 4 the Prosecution ” et ” Train ” qui est si funky. J’aurais aimé qu’il enregistre plus de titres de ce genre… J’aime aussi ” Crucial “, ” Big Tall Wall “, ” Crystal Ball “, qui est vraiment à part, et ” In A Large Room With No Light “. Je me souviens très clairement d’une version studio de cette chanson que nous avions enregistrée et mixée à Sunset Sound, et je ne comprends pas qu’elle ne figure pas dans ce coffret. C’est dommage, car c’est un grand titre. La version retenue est celle d’une répétition avec le groupe, car nous avions l’habitude d’enregistrer ces répétitions. De cette manière, il pouvait choisir sa version préférée. Ca ne voulait pas dire qu’il préférait ces versions en répétitions aux versions enregistrées en studio, mais qu’il essayait toutes les combinaisons possibles. Ces versions studio étaient comme un portrait peint, tandis que les versions en répétitions s’apparentaient plus à de grandes fresques murales. ” Strange Relationship ” en est un bon exemple. Nous l’avons enregistrée un nombre incalculable de fois, en studio, live, en répétitions jusqu’à ce qu’il en soit satisfait.
La version alternative de ” Power Fantastic (Live in Studio) ” est un autre grand moment de ce coffret.
” Power Fantastic ” est une chanson écrite par Lisa Coleman que j’avais enregistrée à Londres, aux studios Advision, avec Wendy & Lisa pendant que Prince tournait Under the Cherry Moon dans le Sud de la France. Il nous avait envoyé à Londres pour enregistrer quelques titres, dont ” Mountains “. Lisa a fait ensuite écouter ce morceau à Prince, qui a écrit les paroles et l’a finalement enregistré dans son home-studio, qui venait d’être tout juste terminé. Je n’oublierai jamais cet enregistrement : Wendy à la guitare et Lisa au piano étaient à l’étage. Bobby Z. et Brownmark étaient dans la cabine située à l’étage du dessous, respectivement à la batterie et à la basse, et Eric Leeds et Matt Blistan étaient aussi présents dans la pièce. Il n’y avait plus de place, ni de cabine libre pour Prince, qui était obligé de chanter sa partie vocale dans la salle de contrôle où se trouvait la console, et moi derrière. Le problème, c’est qu’il n’y avait pas assez de casques disponibles car le studio venait tout juste d’être terminé, et il n’était pas conçu pour accueillir tout un groupe. Il était assez petit, et il n’y avait pas assez de casques pour tout le monde. J’ai dû laisser le dernier casque à Prince, et je ne pouvais donc pas écouter la musique pendant l’enregistrement. Nous étions juste tous les deux derrière la console, et rappelez-vous qu’il exigeait toujours que les ingénieurs du son quittent le studio lorsqu’il enregistrait ses prises de voix. Mais ce jour-là, il n’avait pas le choix. Il m’a demandé d’installer le micro dans le coin le plus reculé de la salle, et pendant la prise, le seul son que j’ai entendu était celui de sa voix, à quelques centimètres de moi. C’était un moment incroyable, magnifique et extraordinaire.
Parlez-nous de la version originale ” perdue ” de ” Wally “.
Au moment de l’enregistrement de Sign of the Times, Prince allait se marier avec Susannah Melvoin, la sœur jumelle de Wendy, mais ils ont fini par se séparer et c’était un moment très dur à vivre pour lui. Elle est partie vivre en Californie, et il était vraiment très triste durant cette période. J’ai pensé qu’il allait se mettre à écrire une chanson inspirée par cette rupture, une chanson où il raconterait ouvertement sa peine, mais il écrivait surtout des titres festifs comme ” Housequake ” ou ” Play in the Sunshine ” à ce moment-là… Un matin, il m’a appelé pour me demander de venir au studio. Sur place, il m’a demandé de sonoriser le piano et d’installer les micros pour la batterie. Il est ensuite passé d’instrument en instrument pour interpréter la version originale de ” Wally “. C’était tellement beau, et si extraordinaire. Sur le moment, ça m’a fait penser à Stevie Wonder. C’était une magnifique chanson de rupture qui faisait ressortir tout le chagrin qui était en lui. Il jouait sur le mot ” Melody “, qui sonnait comme ” Malady “, et le refrain faisait ” Oh malady doll, oh my malady. “ Pour moi, c’était la chose la plus belle, la plus vraie et la plus profonde qu’il avait jamais enregistrée. Dès la fin de l’enregistrement, il m’a demandé de faire un mix rapide pour en faire une cassette, puis il m’a dit : ” ouvre les 24 pistes et efface-les. “ On se trouvait des deux côtés du lecteur de bandes et je l’ai imploré de ne pas le faire. Je lui ai dit : ” On n’a pas dormi de la nuit, peut-être que tu devrais te reposer et la réécouter demain matin quand tu auras les idées plus claires. Ne fais pas ça, s’il te plaît. “ Il m’a répondu : ” Si tu ne veux pas le faire, c’est moi qui le ferai “ et il a saisi la télécommande et il a effacé toutes les pistes… Quelques jours plus tard, il l’a réenregistrée, mais l’intention de la chanson était complètement différente. C’était la même chanson, mais avec une attitude différente, et c’est la version qui se trouve sur ce coffret. En ce qui me concerne, je n’ai jamais réentendu la version originale, mais Prince avait gardé cette cassette, mais je ne sais pas ce qu’il en fait. Il l’a peut-être jetée, ou donnée à quelqu’un, ou même perdue…
On trouve aussi trois titres composés pour Bonnie Raitt dans cette sélection, ” I Need a Man “, ” Promise to Be True “, ” Jealous Girl (Version 2) ” et ” There’s Something I Like About Being Your Fool “. Quelle est l’origine de ces chansons ?
Quand j’ai rejoint Prince en 1983, ces chansons étaient destinées à Vanity 6. En 1985, Prince est parti faire des repérages dans le Sud de la France pour Under the Cherry Moon. Je suis restée avec Bonnie Raitt, et Prince m’avait donné une liste de chansons du Vault sur lesquelles elle devait chanter et jouer de la guitare. Nous avons enregistré des maquettes, et c’était un moment très agréable car Bonnie est une personne passionnante. Quand Prince est revenu, il a écouté les chansons que nous avions enregistrées, puis il a eu une longue conversation avec Bonnie. Il lui a dit : ” je peux te donner ces chansons, mais je n’aurai pas le temps de travailler dessus car j’ai beaucoup d’autres projets en ce moment. “ C’est la raison pour laquelle ces chansons ont été abandonnées.
Une des grandes découvertes de ce coffret est la version alternative de ” Forever in My Life “. Existe-t-il d’autres versions alternatives de titres de Sign of the Times dans le Vault ?
Oui, et je pense encore à ” U Got the Look “, mais nous avons enregistré la version qui figure sur l’album par-dessus la version originale qui était beaucoup plus lente et dont nous avions accéléré la partie de batterie. Peut-être qu’un mix existe quelque part… Au départ, c’était presque une ballade, mais Prince n’en était pas satisfait, alors qu’il aimait beaucoup la version finale. Je pense que les fans seront très contents de découvrir la version originale d’” I Could Never Take the Place of Your Man “. On l’a ressortie du Vault, nous l’avons un peu modernisée et je suis très heureuse qu’elle fasse partie de ce coffret. Les parties de guitare sont incroyables… Au-delà de ces considérations, j’espère que le public comprendra à l’écoute de ces titres à quel point Prince était créatif. En l’espace d’un an, il pouvait produire autant de chansons qu’un autre artiste en dix ans.
Pensez-vous que Prince était au sommet de sa carrière durant cette période ?
C’est difficile de répondre, car il faut prendre en compte toute sa carrière. Purple Rain définit le sommet de sa première période créative. Controversy et 1999 guident Prince vers la consécration de Purple Rain, puis Around the World in a Day et Parade conduisent vers un autre sommet qui est Sign of the Times. Mais pour moi, Dirty Mind reste un autre sommet incontournable. Cet album représente une révolution artistique pour Prince. C’était un pari très risqué. Ce n’est peut-être pas le meilleur album de sa carrière, mais pour moi, tout son génie y est déjà présent. C’est un modèle de construction de carrière pour un artiste, le genre d’audace qui peut faire de vous un artiste à part entière et j’espère que les futurs historiens de la musique souligneront l’importance de Dirty Mind dans la carrière de Prince.
Propos recueillis par Christophe Geudin
Prince Sign of the Times Super Deluxe (Warner Records). Sortie le 25 septembre en éditions Super Deluxe (8CD+DVD / 13LP+DVD), Deluxe (3CD / 4LP 180-grammes) album remasterisé (2CD / 2LP 180-grammes couleur pêche) et versions digitales.

Prince “Sign Of The Times Super Deluxe”
Sept mois séparent la première version de « Witness 4 the Prosecution » et sa deuxième lecture. Dans sa proposition initiale, un furieux rock Hendrixien enregistré live est interprété collectivement par un groupe réuni en studio. La seconde est un exercice solo 100% synthétique, uniquement porté par une voix, des programmations de claviers et le saxophone d’Eric Leeds. Entre les deux, Prince a dissous The Revolution pour s’embarquer dans l’aventure autocratique qui donnera naissance au légendaire Sign of The Times.
L’édition Super Deluxe du magnum opus de 1987 capture cette passionnante phase de mutation avec 47 titres inédits. Réparties sur 3-CDs et présentées de manière chronologique, ces excavations du fameux Vaut compilent les plages « perdues » de The Dream Factory, formidable essai pop-funk avorté dominé par l’aura de Wendy & Lisa, de Crystal Ball, la première configuration triple-LP de Sign of The Times, des chansons de Camille, l’alter-ego à la voix pitchée, et divers projets avortés, dont la tentative de comédie musicale The Dawn et une sélection de titres écrits pour des tiers, parmi lesquels Miles Davis, Sheila E., Joni Mitchell et Bonnie Raitt. Au-delà des titres studio mixés et prêts pour diffusion, on trouve aussi des prises alternatives d’extraits de Sign of The Times, des edits de répétitions (« And That Says What », « It Ain’t Over ’Til The Fat Lady Sings », « Soul Psychodelicide » par le line-up cuivré de The Revolution) et des versions extended jamais parues (« Wonderful Day » et un anecdotique Club Mix de Shep Pettibone pour « Strange Relationship »).
Le premier des trois volumes de cette offre pléthorique est marqué du sceau de Wendy Melvoin et Lisa Coleman, à la manœuvre sur l’extravagance Beatlesienne « All My Dreams », l’exercice Paisley Underground « Teacher Teacher », la valse-comptine « A Place in Heaven », les interludes instrumentaux « Visions » et « Colors », le carnavalesque « In a Large Room With No Light », la version psychédélisante de « Strange Relationship » – présentée pour la première fois dans son intégralité – et une fascinante prise inédite de « Power Fantastic », introduite par les instructions du maestro (« Ça ne sera peut-être pas la bonne, mais jouez ce que vous voulez et prenez du bon temps… »). Avec « Can I Play With U ? », témoignage superlatif de la rencontre au sommet avec Miles Davis période Tutu et le prototype synth-pop d’« I Could Never Take the Place of Your Man » gravé en 1979, ces classiques bien connus des collectionneurs constituent le meilleur d’un premier CD où les hits éclipsent quelques misses, à l’image d’un « Love and Sex » saturé et brouillon destiné à Sheila E. De même, « The Ballad of Dorothy Parker (With Horns) » est entravé par le saxophone intrusif d’Eric Leeds, tandis qu’une version 45-tours du labyrinthique « Crystal Ball », tronçonné à 3 minutes 30, fait figure de sévère coitus interruptus.
Désormais attribués à Sony Music, les droits d’utilisation d’une des plus légendaires créations Princières privent également l’auditeur d’autres extraits du coffret Crystal Ball paru officiellement en 1998, dont les incontournables « Movie Star », « Sexual Suicide » et « Last Heart ». Cette obligation contractuelle laisse toutefois place à une nouvelle série d’inédits de cette même période. Parmi les raretés du deuxième disque issu du Vault, les trois extraits de la comédie musicale avortée The Dawn alignent la somptueuse ballade « Crucial », dans un mix alternatif incluant les cordes de Clare Fisher, l’electro-funk glacé de « The Cocoa Boys » et l’uptempo « When The Dawn of the Morning Comes », qui préfigure à sa manière le frénétique « Trust » de la BO de Batman. Sont également alignés « The Ball », modèle go-go du « Eye Know » de Lovesexy, « Everybody Want What They Don’t Got », épatante miniature pop sous influence Fab Four, « Blanche », une jam Stonienne improvisée au Sunset Sound Studio, et l’élégant mid-tempo funky « It Be’s Like That Sometimes ». En milieu de parcours, la prise alternative de « Forever in My Life (Early Vocal Studio Run-Through) » définit un des sommets incontestables du coffret. Ici, le gospel electro minimaliste de Sign of The Times se pare d’un arrangement complet, avec guitare, basse, batterie et claviers pour une merveille mélodique digne des grandes ballades solos de Paul McCartney.
Moins satisfaisant dans son ensemble, le troisième et dernier volume d’inédits s’ouvre par un double-punch avec le funk laidback d’« Emotional Pump », offert de manière incongrue et finalement décliné par Joni Mitchell, et l’electro-rock abrasif de « Rebirth of the Flesh ». « Wally », la V2 opératique d’un grand titre perdu, et le gospel exubérant de « Walkin’ In Glory » tempèrent le quatuor de compositions anodines écrites pour Vanity 6 et adressées à Bonnie Raitt, qui les rejettera poliment (un « I Need a Man » astucieusement cuivré, « Jealous Girl » (version 2), « Promise To Be True » et le simili-reggae « There’s Something I Like About Your Fool »).
Occasionnellement en pilotage automatique, voire débordé par la gauche par son trop-plein créatif, Prince évolue entre fulgurances géniales, expérimentations multi-genres fascinantes et bon grain et ivraie dans cette généreuse somme parcourant les années 1985-1987. Il s’avère surtout un remarquable éditeur dont les choix judicieux ont permis d’aboutir à la réussite artistique totale de Sign of The Times. Présenté pour la première fois en version remasterisée*, l’album original est également augmenté dans son édition Super Deluxe par un disque de faces-B et de versions maxi, et surtout d’un concert donné en plein air au Stade de Galgenwaard d’Utrecht le 20 juin 1987. À l’instar de sa prise alternative proposée dans la sélection d’inédits studio, l’interprétation live de « Forever In My Life » est le point culminant d’un show dynamique et d’excellente facture, à l’image d’une tournée exemplaire érigée au rang de mythe. Durant plus de 13 minutes, Prince embarque 15000 bataves dans de longues improvisations folk-bluesy, avant de baisser le rideau sur un foudroyant « It’s Gonna Be a Beautiful Night », point final du versant audio d’un édifice (presque) à la hauteur de son illustre double-pilier central.
* Le lien d’écoute fourni par Warner Records ne permet pas de juger la qualité audiophile de ce nouveau remaster. De même, la vidéo du concert de Paisley Park du 31 décembre 1987 n’a pas été disponible en preview.
Prince Sign of the Times Super Deluxe (Warner Records)****. Sortie le 25 septembre en éditions Super Deluxe (8CD+DVD / 13LP+DVD / téléchargement et streaming des titres audio), Deluxe (3CD / 4LP 180-grammes / téléchargement et streaming) et album remasterisé (2CD / 2LP 180-grammes couleur pêche/ téléchargement et streaming).

Audio : Prince “I Need a Man”
Huit jours avant la sortie de la réédition augmentée de Sign O’ The Times, voici le dernier extrait inédit extrait de l’édition Super Deluxe du coffret.
“I Need A Man” a été enregistrée à la Washington Avenue Warehouse le 22 janvier 1987 en compagnie de l’ingénieure du son Susan Rogers.
Bien que la construction des studios Paisley Park allait encore prendre plusieurs mois, le label Paisley Park Records était en pleine expansion au moment où Prince a contacté Bonnie Raitt après l’avoir vue sur scène. “I Need A Man” est la première des quatre chansons qu’il lui a offertes.
Ce titre, initialement enregistré en août 1981 pour The Hookers, les futures Vanity 6, a été complètement remodelé pour Bonnie Raitt et remis à jour avec une batterie acoustique, des ajouts de claviers Fairlight et Mirage, des parties de saxophone, de trompette et la voix-guide de Prince. Toutefois, cette collaboration ne s’est pas matérialisée et cette nouvelle version d’”I Need A Man” a été remisée dans le Vault et est restée inédite jusqu’à ce jour.
Découvrez “I Need a Man” ci-dessous :

Audio : Prince « Forever in My Life (Early Vocal Studio Run-Through) »
Après “Witness 4 The Prosecution (Version 1)” , “version 2″, “I Could Never Take The Place Of Your Man (1979 Version)”, et “Cosmic Day”, l’édition Super Deluxe de Sign O’ The Times de Prince dévoile un nouvel extrait inédit.
Enregistrée le 8 août 1986 dans son home-studio de Galpin Boulevard, « Forever in My Life (Early Vocal Studio Run-Through) » définit un des sommets de ce coffret Super Deluxe. Ici, le gospel electro minimaliste de Sign of The Times se pare d’un arrangement complet, avec guitare, basse, batterie et claviers pour une merveille mélodique digne des grandes ballades solos de Paul McCartney.
Découvrez « Forever in My Life (Early Vocal Studio Run-Through) » ci-dessous. L’édition Super Deluxe de Sign O’ The Times sera disponible le 25 septembre.
Rendez-vous prochainement dans ces pages pour l’analyse complète du coffret et une (longue) série d’interviews exclusives dédiées à cette réédition événement.

Audio : Prince “Witness 4 The Prosecution (Version 2)”
Après “Witness 4 The Prosecution (Version 1)” et “I Could Never Take The Place Of Your Man (1979 Version)”, l’édition Super Deluxe de Sign O’ The Times de Prince dévoile un nouvel extrait inédit.
“Witness 4 The Prosecution (Version 2)”, une relecture electro-minimaliste du rock Hendrixien dévoilé le mois dernier, a été enregistrée au Sunset Sound Studio de Los Angeles le 6 octobre 1986 et comprend les participations d’Atlanta Bliss à la trompette et d’Eric Leeds au saxophone.
Découvrez “Witness 4 The Prosecution (Version 2)” ci-dessous. L’édition Super Deluxe de Sign O’ The Times sera disponible le 25 septembre.
Rendez-vous prochainement dans ces pages pour l’analyse complète du coffret et une (longue) série d’interviews dédiées à cette réédition événement.

Audio : Prince “Cosmic Day”
Après “Witness 4 The Prosecution (Version 1)” et “I Could Never Take The Place Of Your Man (1979 Version)”, l’édition Super Deluxe de Sign O’ The Times de Prince dévoile un nouvel extrait inédit.
“Cosmic Day” a été enregistrée au studio 3 de Sunset Sound le 15 novembre 1986 avec les ingénieurs du son Susan Rogers et Coke Johnson. Prince y adopte la voix de son alter-ego “Camille”, mélange des batteries live et synthétiques, des parties de guitares et des claviers qui ajoutent une touche de surréalisme éthéré à la chanson. Bien que “Cosmic Day” ne soit pas apparue dans les configurations originales de Crystal Ball ou de Sign O’ The Times, des éléments de cette chanson ont été utilisés par Prince en 1988 lors de l’interlude de la tournée Lovesexy.
Découvrez “Cosmic Day” ci-dessous. L’édition Super Deluxe de Sign O’ The Times sera disponible le 25 septembre.
Crédit photo copyright The Prince Estate-photo by Jeff Katz.

Audio : Prince “I Could Never Take the Place of Your Man (1979 Version)”
Après “Witness 4 The Prosecution (Version 1)”, l’édition Super Deluxe de Sign Of The Times, la réédition du double-album mythique de Prince attendue pour le 25 septembre, dévoile un nouveau titre inédit.
“I Could Never Take The Place Of Your Man (1979 Version)” a été enregistrée au Hollywood Sound Recorders (Studio A) le 23 mai 1979, avec l’ingénieur du son Bob Mockler. Il s’agit de l’enregistrement le plus ancien de l’édition Super Deluxe, qui remonte au séances de l’album Prince, enregistré en 1979. Son instrumentation est particulièrement minimaliste : batterie et claps live, basse, guitare, claviers et neuf pistes de voix de Prince.
Cette version a été exhumée du vault en juin 1986 avant d’être ré-enregistrée avec un nouveau solo ajouté par Prince et une remise à jour sonore de l’ensemble. Cette nouvelle version occupait une place de choix dans les albums inédits Dream Factory et Crystal Ball avant de finalement paraître sur Sign O’ The Times en 1987.
Découvrez “I Could Never Take The Place Of Your Man (1979 Version)” de Prince ci-dessous.
Photo ouverture : ⓒ The Prince Estate-Jeff Katz)

“Sign Of The Times Super Deluxe” de Prince en septembre
Après Purple Rain et 1999, Sign Of The Times, le double opus magnum de Prince, aura droit à son traitement Super Deluxe à la rentrée.
Paru en avril 1987, Sign Of The Times sera augmenté le 25 septembre prochain de plusieurs disques additionnels, dont un composé de faces-B et versions extended, trois volumes renfermant 45 titres inédits issus du fameux Vault de Paisley Park, le concert audio intégral d’Utrecht (Hollande) et le DVD complet d’un show donné à Paisley Park le 31 décembre 1987 avec Miles Davis en invité spécial. Communiqué officiel et tracklisting ci-dessous.
Communiqué officiel
(Minneapolis, Minnesota – 25 juin 2020) – Débordant d’idées musicales et de textes d’actualité aussi pertinents aujourd’hui qu’à l’époque de leur parution, l’incontournable double album Sign O’ The Times capture Prince en pleine réinvention. Sa version finale de 16 titres n’offrait pourtant que quelques-unes des innombrables chansons enregistrées par Prince lors de la prolifique période 1985-1987, au moment de la dissolution de son groupe The Revolution, de la construction de son complexe d’enregistrement dernier cri Paisley Park et de la conception (finalement abandonnée) des albums Dream Factory, Camille et Crystal Ball.
Le 25 septembre, le Prince Estate, en partenariat avec Warner Records, rééditera Sign O’ The Times via tous les partenaires de distribution physique, digitale et streaming en proposant l’album original remasterisé pour la première fois enrichi de 63 titres inédits et d’un concert vidéo inédit de plus de deux heures issus du légendaire vault de Prince. Précommandes disponibles ICI.
Cette série de rééditions sera déclinée sous les formats suivants :
• Édition Super Deluxe (8CD+DVD / 13LP+DVD / téléchargement et streaming des titres audio)
• Édition Deluxe (3CD / 4LP 180-grammes / téléchargement et streaming)
• Album remasterisé (2CD / 2LP 180-grammes couleur pêche/ téléchargement et streaming)
Après le succès de l’édition Super Deluxe de 1999 parue à l’automne 2019, l’édition Super Deluxe de Sign O’ The Times correspond à la plongée la plus profonde entreprise à ce jour dans le vault de Prince avec 92 titres audio répartis sur 8 CDs et 13 vinyles 180-grammes.
Cette édition Super Deluxe offre aux fans tous les titres audio parus officiellement en 1987, 45 titres studio inédits enregistrés entre mai 1979 et juillet 1987 et un concert intégral enregistré le 20 juin 1987 lors du concert de la tournée Sign O’ The Times au Stadium Galgenwaard d’Utrecht, en Hollande.
De plus, les coffrets CD et vinyle contiennent également un tout nouveau DVD proposant le concert intégral et inédit donné à Paisley Park le 31 décembre 1987. Ce concert caritatif est le dernier de la tournée Sign O’ The Times et marque l’unique collaboration sur scène de Prince avec la légende du jazz Miles Davis.
L’édition Super Deluxe contient également un livre relié de 120 pages incluant les paroles manuscrites inédites de certains titres de cette époque, dont celles des hits “U Got The Look”, “I Could Never Take The Place Of Your Man” et “Hot Thing”, des photos célèbres prises au cours de cette période par Jeff Katz, le photographe principal de Prince du milieu des années 1980 jusqu’au début des années 1990, et des archives incluant les photographies des bandes masters analogiques originales et des feuilles de studio.
L’édition Super Deluxe est complétée par de nouveaux essais rédigés par des pairs et proches de Prince, dont Dave Chappelle (en entretien avec le photographe Mathieu Bitton) et Lenny Kravitz; Susan Rogers, l’ingénieure du son de longue date de Prince; Daphne A. Brooks et William R. Kenan, Jr., professeurs en études afro-américaines, études américaines et études de la femme, du genre et de la sexualité à l’Université de Yale; l’auteur et animateur radio de Minneapolis et du Official Prince Podcast Andrea Swensson et le spécialiste Princier Duane Tudahl.
L’édition Super Deluxe de Sign O’ The Times propose une analyse en profondeur du processus créatif unique d’un musicien, songwriter, producteur et performer au tournant de sa carrière. Elle explique aussi pourquoi son œuvre insurpassable continue d’engendrer autant d’amour et de de passion à travers le monde.
En complément pour les fans collectionneurs, un coffret 45-tours limité et numéroté à 1987 exemplaires et manufacturé à Detroit par Third Man Pressing sera également disponible. Celui-ci propose les quatre singles 45-tours officiels parus en 1987, deux singles promo officiels de Warner Records et un tout nouveau single réunissant les deux versions du titre inédit “Witness 4 The Prosecution”. Ce coffret est disponible en précommande dès maintenant en exclusivité sur le Prince Store officiel et le Third Man Records Store. Ce coffret devrait être expédié aux alentours du 14 août.
“Witness 4 The Prosecution (Version 1)” est disponible dès maintenant sur toutes les plateformes de téléchargement et de streaming. Présent dans le coffret Super Deluxe, ce titre a été enregistré le 14 mars 1986 dans le home-studio de Prince, sur Galpin Boulevard, et aurait dû figurer sur l’album abandonné Dream Factory. Écoutez ce titre ICI.
Tracklisting Super Deluxe Edition
CD1 / LP1: Remastered Album (Disc 1)
1 Sign O’ The Times
2 Play In The Sunshine
3 Housequake
4 The Ballad Of Dorothy Parker
5 It
6 Starfish And Coffee
7 Slow Love
8 Hot Thing
9 Forever In My Life
CD2 / LP2: Remastered Album (Disc 2)
1 U Got The Look
2 If I Was Your Girlfriend
3 Strange Relationship
4 I Could Never Take The Place Of Your Man
5 The Cross
6 It’s Gonna Be A Beautiful Night
7 Adore
CD3 / LP3&4: Single Mixes & Edits
1 Sign O’ The Times (7” single edit)
2 La, La, La, He, He, Hee (7” single edit)
3 La, La, La, He, He, Hee (Highly Explosive) (7” single edit)
4 If I Was Your Girlfriend (7” single edit)
5 Shockadelica (“If I Was Your Girlfriend” B-side)
6 Shockadelica (12” long version)
7 U Got The Look (Long Look) (12” edit)
8 Housequake (7” edit)
9 Housequake (7 Minutes MoQuake) (12” edit)
10 I Could Never Take The Place Of Your Man (Fade 7” edit)
11 Hot Thing (7” single edit)
12 Hot Thing (Extended Remix)
13 Hot Thing (Dub Version)
CD4 / LP5&6: Vault, Part 1
1 I Could Never Take The Place Of Your Man (1979 version)
2 Teacher, Teacher (1985 version)
3 All My Dreams
4 Can I Play With U? (featuring Miles Davis)
5 Wonderful Day (original version)
6 Strange Relationship (original version)
7 Visions
8 The Ballad Of Dorothy Parker (with horns)
9 Witness 4 The Prosecution (version 1)
10 Power Fantastic (live in studio)
11 And That Says What?
12 Love And Sex
13 A Place In Heaven (Prince vocal)
14 Colors
15 Crystal Ball (7” mix)
16 Big Tall Wall (version 1)
17 Nevaeh Ni Ecalp A
18 In A Large Room With No Light
All tracks previously unreleased
CD5 / LP7&8: Vault, Part 2
1 Train
2 It Ain’t Over ‘Til The Fat Lady Sings
3 Eggplant (Prince vocal)
4 Everybody Want What They Don’t Got
5 Blanche
6 Soul Psychodelicide
7 The Ball
8 Adonis And Bathsheba
9 Forever In My Life (early vocal studio run-through)
10 Crucial (alternate lyrics)
11 The Cocoa Boys
12 When The Dawn Of The Morning Comes
13 Witness 4 The Prosecution (version 2)
14 It Be’s Like That Sometimes
All tracks previously unreleased
CD6 / LP9&10: Vault, Part 3
1 Emotional Pump
2 Rebirth Of The Flesh (with original outro)
3 Cosmic Day
4 Walkin’ In Glory
5 Wally
6 I Need A Man
7 Promise To Be True
8 Jealous Girl (version 2)
9 There’s Something I Like About Being Your Fool
10 Big Tall Wall (version 2)
11 A Place In Heaven (Lisa vocal)
12 Wonderful Day (12” mix)
13 Strange Relationship (1987 Shep Pettibone Club Mix)
All tracks previously unreleased
CD7&8 / LP11-13: Live In Utrecht – June 20, 1987
1 Intro/Sign O’ The Times
2 Play In The Sunshine
3 Little Red Corvette
4 Housequake
5 Girls & Boys
6 Slow Love
7 Take The “A” Train/Pacemaker/I Could Never Take The Place Of Your Man
8 Hot Thing
9 Four
10 If I Was Your Girlfriend
11 Let’s Go Crazy
12 When Doves Cry
13 Purple Rain
14 1999
15 Forever In My Life
16 Kiss
17 The Cross
18 It’s Gonna Be A Beautiful Night
All tracks previously unreleased
DVD: Live At Paisley Park – December 31, 1987
1 Sign O’ The Times
2 Play In The Sunshine
3 Little Red Corvette
4 Erotic City
5 Housequake
6 Slow Love
7 Do Me, Baby
8 Adore
9 I Could Never Take The Place Of Your Man
10 What’s Your Name Jam
11 Let’s Pretend We’re Married
12 Delirious
13 Jack U Off
14 Drum Solo
15 Twelve
16 Hot Thing
17 If I Was Your Girlfriend
18 Let’s Go Crazy
19 When Doves Cry
20 Purple Rain
21 1999
22 U Got The Look
23 It’s Gonna Be A Beautiful Night Medley (featuring Miles Davis)
All tracks previously unreleased
* N.B. le contenu vidéo est exclusif au DVD physique et ne sera pas disponible sur les versions téléchargement et streaming du coffret Super Deluxe.
PRINCE – SIGN O’ THE TIMES - LIMITED EDITION 7” VINYL SINGLES BOXED SET
1B La, La, La, He, He, Hee (Edit)
2A If I Was Your Girlfriend (Edit)
3A U Got The Look
3B Housequake (Edit)
4A I Could Never Take The Place Of Your Man (Fade)
4B Hot Thing (Edit)
5A Hot Thing (Edit)
5B Hot Thing (Edit)
6A The Cross
6B Adore
7A Witness 4 The Prosecution (Version 1)
7B Witness 4 The Prosecution (Version 2)
Tracks 7A and 7B previously unreleased