
“Wattstax 20 août 1972, une fierté noire”
” Je suis quelqu’un/Je suis peut-être pauvre, mais je suis quelqu’un/Je n’ai peut-être aucune qualification, mais je suis quelqu’un/Je suis noir, magnifique, fier. Je dois être respecté/Je dois être protégé/Quelle heure est-il ? C’est l’heure de la nation “.
Scandés le 20 août 1972 au Coliseum de Los Angeles, les mots de Jesse Jackson inaugurent le légendaire Festival de Wattstax. Zénith de la fierté noire et grand-messe de la soul music, ce concert-événement, un temps baptisé Wattstock -en référence à son homologue hippie de 1969-, est le point central de l’ouvrage du journaliste et auteur Guy Darol.
Complément idéal des albums live et du merveilleux film de Mel Stuart, le récit de Wattstax 20 août 1972, une fierté noire, de sa gestation administrative aux performances de Rufus Thomas, The Bar-Kays, The Staple Singers et du Moïse noir Isaac Hayes, est prolongé par une passionnante remise en perspective historique.
Dans Wattstax, Guy Darol tire un remarquable trait d’union entre les origines de la ségrégation, les émeutes du quartier de Watts en 1965, le récent mouvement Black Lives Matter et l’histoire contrariée du label Stax. Car si le festival de Wattstax fut le point d’orgue de la formidable enseigne colourblind, il fut aussi son chant du cygne.
Wattstax 20 août 1972, une fierté noire de Guy Darol **** (éditions du Castor Astral, 192 pages, 15,90 €). Disponible.

Isaac Hayes, la biographie en français
Parue en mai dernier et rédigée par David Desvérité, Isaac Hayes, l’esprit soul, est la première biographie en français dédiée au Black Moses. Son texte alerte et richement documenté retrace le parcours contrasté de l’enfant du ghetto de Memphis à la superstar oscarisée du label Stax dans les années 1970, mais aussi ses années de déclin et de rebonds inattendus, jusqu’à sa disparition d’une crise cardiaque en 2008, à l’âge de 65 ans.
Au-delà d’une carrière musicale démarrée en solo, puis en tandem avec le parolier David Porter aux côtés d’Otis Redding et Sam and Dave lors de l’âge d’or d’Atlantic/Stax, puis de l’invention d’un genre basé sur les versions alanguies et Wagnériennes de standards pop (voir notre longue interview exclusive avec Isaac Hayes dans Funk★U n°7, en 2006), cette biographie met également en valeur la facette philanthrope et militante du créateur d’Hot Buttered Soul et des bandes originales de Shaft et Truck Turner.
Rattrapé par le Fisc, arnaqué par les dirigeants de Stax, abandonné par ses proches et distancé par la vague disco (et par Barry White, son rival de toujours) à l’issue de ses glorieuses années 1970, Isaac Hayes bénéficiera d’un deuxième souffle grâce aux samples du trip-hop, du hip-hop et surtout à son apparition caustique dans le rôle du Chef dans South Park, avant de succomber aux sirènes de l’Église de scientologie dans ses dernières années.
Accompagné d’une judicieuse discographie sélective, une lecture attentive d’Isaac Hayes, l’esprit soul s’impose également à la veille de la parution de titres inédits attendus dans les prochains mois.
Isaac Hayes, l’esprit soul de David Desvérité (Castor Music, 256 pages). En librairies.