Brooklyn débarque à Barbès à l’occasion de la première édition française du festival Afropunk dans un Trianon redécoré aux couleurs afro, avec stands de vêtements subsahariens, peintures funky live et acras de morue équitables. De l’afro, donc, mais aussi du vrai punk en ouverture de cette première soirée avec Youth Man, trio british emmené par une furie dont les double-croches de Telecaster prendront par surprise un Trianon copieusement rempli dès la fin d’après-midi. Ombre et lumière avec l’arrivée de Sandra Nkaké, en duo voix/sample/flûte avec Jî Drû pour une sélection d’originaux et de reprises habitées de Screamin’ Jay Hawkins (« I Put a Spell On You ») aux Doors (« Light My Fire ») en passant par une vibrante relecture du « Heroes » de David Bowie secouée de spasmes electro-sensibles.
Leon Bridges et sa résurrection du doo-wop et des cravates sudistes décroche ensuite un franc succès à l’applaudimètre en exécutant la quasi-totalité de Coming Home, son premier album à paraître le 22 juin, en compagnie d’un septette straight from Fort Worth, Texas. La gestuelle scénique est encore aussi étriquée que ses costumes de Southern Gentleman, mais ses chansons directes et parfois poignantes – le vigoureux « Smooth Sailin' » et un très beau »River » final – compensent une raideur timide qui n’est pas sans rappeler les débuts en public de Marvin Gaye.
Tête d’affiche de la soirée, Keziah Jones, seul avec sa guitare electroacoustique et son chapeau king size emprunté à Pharrell Williams, conclue la soirée aux alentours de 22 heures avec un set unplugged de 40 minutes centré sur un best-of de son répertoire blufunk. Une performance courte, mais totale via des versions hyper-dynamiques de « Where’s Life », « Million Miles From Home », « Beautiful Émilie » et l’attendu « Rhythm Is Love » avant l’extinction des feux. Keziah Jones joue à domicile, se remémore avec le sourire ses années de manche dans les rues parisiennes et londoniennes et ressort son vieux gimmick de scène consistant à transformer sa guitare en djembé. Lors de cet interlude percussif, le plus francophile des guitaristes nigérians détourne les paroles d’une de ses premières compositions pour résumer idéalement l’exportation réussie de ce nouveau festival : Afropunk is a fact !