Sugar Man, le magnifique documentaire de Malik Bendjelloul, retrace l’incroyable histoire de Sixto Rodriguez, auteur de deux albums cultes, Cold Fact et Coming From Reality, publiés chez Buddha et Sussex en 1970 et 1971. Songwriter maudit au croisement de Bob Dylan pour ses textes acerbes et de Sly Stone pour son folk-funk assisté par les Motownmen Dennis Coffey et Bob Babbit, Rodriguez a disparu de la circulation au lendemain de l’insuccès de Coming From Reality. Celui qu’on a longtemps cru mort (suicide sur scène ? Overdose en prison ?) s’est reconverti en ouvrier du bâtiment à Détroit et écoulera sans le savoir près de 500 000 exemplaires de Cold Fact en Afrique du Sud, avant d’effectuer un comeback triomphal en 1998 grâce à la détermination insensée de deux fans. Superbement photographié, Sugar Man est un document passionnant où se mêlent l’horreur de l’apartheid, les arnaques des labels (Clarence Avant, le boss historique de Buddah Records, n’en sort pas grandi) et la stupéfiante humilité d’un artiste floué par l’industrie du disque. Et pour une fois, l’histoire se termine bien : Sixto Rodriguez est remonté sur scène (Funk★U l’avait rencontré à Paris en 2009 au lendemain d’une sublime performance au Nouveau Casino) et coule des jours paisibles dans le Michigan dans un humble pavillon rénové par ses soins. Floué, mais heureux.
Sugar Man, de Malik Bendjelloul. En salles le 26 décembre (distribution ARP). Bande originale disponible le 12 novembre (Sony Legacy).
Film formidable et émouvant.